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Fabrice Luchini :  jongleur habile, il joue sans filet avec les mots

Malin, très malin le Fabrice LUCHINI , qui déboule en solo sur  la scène du Radiant-Bellevue pour nous parler de la « crême » des écrivains 

Avec sa silhouette fragile, son éternelle jeunesse  et son phrasé si particulier que nous lui connaissons, il se lance dans un long monologue sur la relation qu’entretiennent certains  écrivains célèbres  avec l’argent .

De Karl Marx  qu’il veut faire passer pour un capitaliste-humaniste au Grand Victor  Hugo, en passant par Pégui, Céline l’anti sémite, il évoque   » l’humour » de  Cioran plus proche de la mort que du plaisir de vivre   …. Il débite son texte avec un réel plaisir pour le bonheur des 1040 spectateurs venus boire ses paroles et passer une excellente soirée en sa compagnie.  Jongleur habile, il joue sans filet avec les mots et la langue française si riche qu’il veut nous faire aimer. 

Fabrice Luchini improvise et  invente pour nous amuser

Et là, au détour d’un texte compliqué , il improvise et  invente pour nous amuser, nous faire rire  et nous permettre de souffler un peu,   un personnage haut en couleur : le fameux ROBERT.

Bien sûr, pour Luchini  il y a toujours  dans la salle un « Robert » ,  footeux par choix que sa femme autoritaire  qui se pique  de culture,  a sommé de l’accompagner ce soir parce qu’elle veut  découvrir le génie de ses auteurs qui font la richesse de la langue et de l’esprit français. 

La salle s’esclaffe de rire et le voilà qu’il nous balance une citation d’auteur  » J’ai l’impression que la richesse ne résout pas la pauvreté intérieure« . En une phrase tout est dit sur la richesse, la pauvreté et la misère  qu’il balance comme un postulat.

Fabrice Luchini infatigable et farceur

Infatigable et farceur , il se promène sur la scène à 70 ans déjà.  Texte en main et regard qui pétille de malice, il débite un monologue  de  Ruy  Blas d’Hugo afin d’illustrer son propos. Ce qu’il n’avait pas prévu c’est qu’avant la fin de chaque réplique une spectatrice  lui  souffle le mot qui convient. Surpris par une telle culture, il l’interpelle l’inconnue . Elle se prénomme Anna, étudiante en médecine qui connait ses classiques  sur le bout des doigts . Emerveillé, l’artiste la baptise Anna Karénine avant d’engager avec elle une partie de ping-pong du style « Je commence la réplique et tu la finis ». Il n’en croit pas ses oreilles après cette joute verbale. 

De digressions en digressions il se balade d’un auteur à l’autre, d’une improvisation à ses insomnies étranges devant des émissions télé de plus en plus débiles comme celle qu’il évoque  avec  « Ali en mode Love avec Leïla et  de son qahwa qu’il ne veut pas boire dans un café avec une fille dont le  string se glisse dans la raie de ses fesses parce qu »elle  va lui balancer ses poils dans son breuvage »  . Là nous atteignons des sommets de la littérature de quartier.  Dans ses délires  les plus fous il veut assister à l’enregistrement de cette émission télé sans prendre un sou de cachet.  

Fabrice Luchini : un spectacle délirant lorsqu’il parle de lui

Autre moment de grâce dans ce spectacle délirant lorsqu’il parle de lui , de son argent, des voleurs de  la Société Générale qui lui confisquent son fric , de son assurance vie qu’il risque de perdre à cause des subprimes et de la prochaine crise financière  comme celle de  2008 qui avait pu être évitée à l’époque grâce à  Merkel et Sarkosy  qui avaient  injecté des millions d’euros .

Le fric, toujours le fric !  En franc tireur il tape sur tout et tous  en sa qualité  » d’homme  de gauche » : des médias et de l’esprit Télérama pour bobos avertis , des politiques écolos avec Hidalgo et ses vélos, du maire de Lyon qui rêve d’éoliennes sur la place de la crois-rousse …. et avant de clore sa prestation il évoque la philosophie et la sagesse de son ami Johnny en nous relatant quelques anecdotes croustillantes à  l’occasion  de tournages de films ;  du style  » Quand on tourne de nuit il faut attendre le soir » ou « qu’est ce que t’as fait cet après midi en attendant de tourner ?  » et quand Fabrice  lui répond  qu’il a lu des texte ardus en attendant , Johnny laisse tomber  » Tu t’es donc emmerdé ! « . Force est de constaté que nous sommes toujours dans la littérature et la philosophie. 

Après un peu plus de deux heures de lecture-spectacle non stop, l’artiste fatigué mais heureux est ovationné à tout rompre. Il  nous confie que le public  du Radiant qu’il place très haut  dans son estime, a  été vraiment « très  bon ce soir « 

Gérard SERIE 

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