LES MILLE ET UNE VIES DE VICTOR BOSCH

Victor Bosch
Victor Bosch

Actuellement directeur du Radiant-Bellevue à Caluire, Victor Bosch a débuté sa carrière en tant que batteur du groupe Pulsar avant de devenir chargé de production de différents événements, de 1984 à 1989, dont le Festival Berlioz à la Côte-Saint-André, la Biennale d’art contemporain de Lyon et la Biennale de la danse de Lyon puis directeur du Transbordeur. Egalement producteur à succès de la comédie musicale Notre-Dame de Paris, cet homme chaleureux revient, pour UNIK, sur son parcours atypique.

Propos recueillis par Hervé Troccaz 

Votre carrière a débuté sous le signe de la musique.

Au départ je voulais devenir peintre, j’étais assez doué dans ce domaine. J’ai d’ailleurs gagné un concours qui m’a permis de me rendre à Londres pendant un mois. J’ai suivi des cours spécifiques en Angleterre et arpenté les nombreuses salles de la National Gallery. Parallèlement, je fréquentais un club de musique très à la mode, UFO. On y écoutait des morceaux incroyables. Je suis ensuite revenu en France pour préparer les Beaux-Arts. Puis les évènements de 68 ont changé mon destin. J’ai commencé à rencontrer de nombreux copains au lycée, dont Sorj Chalandon, qui deviendra plus tard le chanteur de notre groupe Pulsar. Au fil des ans, la musique a commencé à prendre de plus en plus d’importance pour moi. Les évènements de 68 sont arrivés et je n’ai pas passé mon baccalauréat. 68, ce sont les évènements de la Nuit Debout, puissance un milliard ! C’était un choc culturel énorme ! Avec mes amis nous avons été bouleversés par une série de concerts de groupes importants comme Pink Floyd ou Deep Purple à la Maison de la danse. Des formations qui n’avaient pas l’importance qu’elles ont aujourd’hui. C’était un privilège de les entendre dans ce cadre, en toute intimité. De cette expérience est né notre groupe de musique Pulsar. J’ai, par la même occasion, dit adieu à toutes mes velléités en matière de peinture. La musique a pris le dessus.

Cette période semble placée sous le signe de la création…

Nous avons été le premier groupe français à signer sur un label anglais, Decca. C’était une période formidable, placée sous le signe de l’inventivité. Puis est arrivé un nouveau mouvement, le punk…

Comment avez-vous vécu la fin de cette époque ?

Je me suis retrouvé sans rien. J’ai alors rencontré Guy Darmet, journaliste qui a ouvert la Maison de la danse à la Croix-Rousse en 1982. Il voulait créer la Biennale de la danse. Il m’a engagé à un poste technique, mais très rapidement je me suis retrouvé chargé de production en charge de l’exécutif. Par la suite Thierry Raspail a voulu créer à son tour la Biennale d’art contemporain et m’en a confié la réalisation : nous avons créé un musée éphémère à la Halle Tony Garnier, qui a remporté un immense succès.

Comment êtes-vous devenu directeur du Transbordeur ?

En 1987, André Soulier, alors premier adjoint de Francisque Collomb, est venu me chercher quelques mois avant les élections municipales en me confiant une enveloppe d’un million d’euros dans l’objectif de séduire l’électorat jeune. Il m’a confié la réhabilitation d’une ancienne usine des eaux désaffectée. La salle a été inaugurée en 1989 par un concert du musicien français White Collar. Michel Noir, alors élu nouveau maire de Lyon, m’a reconduit dans mes fonctions.

Autre grand temps fort de votre carrière, la production de Notre-Dame de Paris. Pourquoi avez-vous décidé de vous investir sur ce projet ?

C’est Guy Darmet, alors à la tête de la Maison de la danse, qui m’a présenté Luc Plamondon au Transbordeur. A l’époque ce dernier connaissait une traversée du désert : Michel Berger venait de mourir, il enchainait les échecs. Il m’a fait écouter les titres « Belles » et « Le temps des cathédrales », interprétés par Richard Cocciante. Alors que Luc Plamondon avait essuyé trois refus d’importance dans l’univers du spectacle, j’ai écouté ces chansons sans a priori et compris tout leur potentiel. J’ai alors organisé, en moins de quinze jours, un rendez-vous avec le producteur Charles Talar, qui m’a soutenu financièrement dans cette aventure.

Les chiffres de vente sont alors très importants et le succès considérable !

En un jour nous avons vendu plus de 270 000 disques. Au total nous en vendrons plus de 10 millions ! Par la suite j’ai produit deux autres comédies musicales : Kirikou et Karabaainsi que Le Petit Prince.

Après avoir connu un tel succès vient la fin de l’aventure du Transbordeur.

Gérard Collomb m’a signifié la fin de cette histoire personnelle de 22 ans. Puis un jour mon ami François, actuel administrateur du Radiant-Bellevue, me prévient qu’un appel d’offre est lancé pour reprendre le Radiant-Bellevue à Caluire. Sceptique au départ, je suis conquis à la visite des lieux. Très vite je comprends le potentiel de cette salle. C’est un nouveau challenge pour moi. Le maire me donne carte blanche.

Comment avez-vous conçu la programmation de cette salle ? Quelles en sont les spécificités ?

Avant, le théâtre municipal était le phare culturel d’une ville. Après André Malraux et les années 60, sont nées des structures officielles avec des programmes précis comme le TNP, les MJC ou encore l’Odéon de Paris. Mais ces institutions ont oublié le principal : le côté populaire de ces salles. La programmation du Radiant-Bellevue à Caluire entre en résonnance avec toutes les disciplines. Si je devais réaliser une métaphore je dirais que nous sommes à mi-chemin entre la brasserie et la gastronomie. Tout le monde s’y retrouve, toutes générations confondues. Au Radiant-Bellevue la petite fille vient écouter en semaine le groupe tendance L.E.J, et le dimanche sa grand-mère Yves Jamait. Je veux que le Radiant-Bellevue soit une salle fédératrice pour toutes les générations. Le nombre d’abonnements de plus en plus conséquent prouve également que le public nous fait confiance et vient découvrir de nouveaux spectacles qu’ils n’auraient jamais eu l’occasion de voir auparavant.

Victor Bosch en quelques dates 

– 1951 : naissance à Campredó en Espagne

– 1970 à 1980 : batteur du groupe Pulsar

– 1984 à 1989 : chargé de production du Festival Berlioz à la Côte-Saint-André, de la Biennale d’art contemporain de Lyon et de la Biennale de la danse de Lyon

– 1989 : création du Transbordeur

– 1998 : producteur de Notre-Dame d -Paris

– depuis 2012 : directeur du Radiant-Bellevue

Crédit photo : Didier Michalet