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Mauvaises filles d’Emerance Dubas avec Edith, Michèle, Evelyne, Fabienne
Mauvaises filles – Synopsis
Insoumises, rebelles, incomprises ou simplement mal-aimées. Comme tant d’autres femmes, Édith, Michèle, Éveline et Fabienne ont été placées en maison de correction à l’adolescence. Aujourd’hui, portée par une incroyable force de vie, chacune raconte son histoire et révèle le sort bouleversant réservé à ces « mauvaises filles » jusqu’à la fin des années 1970 en France.
Mauvaises filles – Critique
A différentes périodes en France et sous différentes appellations, ces dites maisons de « correction » ou de « redressement » (1830 à 1870) puis de « protection judiciaire de la jeunesse » en 1990, de « centres d’éducation renforcée » en 1997, de « centres d’observation ou de rééducation » jusqu’en 2001, et ensuite de centres éducatifs fermés, étaient des institutions d’état destinées (dans le cadre de la protection de la jeunesse) à réinsérer des mineurs posant des problèmes de discipline et de petite délinquance.
Si ces prisons pour adolescents(es) Du Bon Pasteur ont existé en France pendant près de deux siècles et ont fait des milliers de victimes, c’est parce que les gouvernements successifs français ont failli à leurs responsabilités en matière d’éducation et de protection de la jeunesse.
Afin de s’exonérer de leurs décisions, les responsables politiques de l’époque partant du constat que la prison ne pouvait être l’unique solution pour les mineurs « délinquants » ayant agi sans discernement, était de les éloigner des villes (trop visibles) et de créer d’abord des colonies pénitentiaires agricoles où les jeunes se réinséreraient par le travail, mais surtout de mettre à disposition du monde rural une main d’oeuvre gratuite.
En confiant à l’église catholique et aux religieuses (véritables capots de camps de concentration) le soin d’administrer dans les villes ces établissements dits Du Bon Pasteur (en référence à Dieu le tout puissant), ce scandale d’état a permis au nom du maintien de la paix sociale, d’interner des milliers d’adolescentes dont certaines familles voulaient ce débarrasser ou qui risqueraient de poser problème à l’ordre public.
A travers les récits poignants de ces femmes Édith, Michèle, Éveline et Fabienne, Emerance Dubas, le documentaire met en lumière les mauvais traitements subis, mais aussi et surtout la solidarité qui existait entre ces naufragées de la vie.
Michèle accompagnée de sa petite fille qui découvre lors de la visite des lieux les conditions de vie extrêmes de sa grand-mère privée d’amour et d’intimité, est fière que celle-ci libère sa parole et lui dise qu’elle a supporté l’insupportable en rêvant et en voyant passer les trains comme la promesse de futurs voyages…
Eveline quant à elle, est une enfant de l’Assistance publique qui a été violée par un voisin. Quand elle consulte son dossier, cette dernière ne décolère pas en découvrant les lettres de ses parents et les colis qu’on ne lui a jamais remis.
Fabienne filmée chez elle, affiche une belle énergie et confirme que cette expérience l’a endurcie. Elle raconte sa tentative de fugue et le mitard, sa sortie ensuite avec les proxénètes et la prostitution, les viols en série et son avortement clandestin à 18 ans…
Avec son documentaire chargé d’émotion et de compassion la réalisatrice semble avoir trouvé la bonne distance pour capter la parole de ces femmes meurtries .
Leurs paroles font souvent froid dans le dos, tant l’insupportable est palpable à travers leurs mots et récits de « déportation » en France . On a l’impression pour ne pas dire le sentiment de revivre les heures noires de la seconde guerre mondiale ou l’humain était relégué au rang d’animaux malfaisants..
Ce qui frappe dans chacune d’entre elles quand elles évoquent leurs souvenirs douloureux, est la douceur de leur voix, leur regards où la haine et la vengeance sont exclus et où seul l’espoir les a porté pour témoigner aujourd’hui, dignement et puissamment.
Comme après une grande catastrophe, le documentaire d’Emerance Dubas a le mérite d’être essentiel, pour que ce formidable plaidoyer contre l’oubli et les violences faites aux femmes, reste gravé de manière indélébiles dans toutes les mémoires au delà d’un énième scandale d’état et de celui de l’église catholique confrontée à d’autres affaires aussi nauséabondes.
Si l’émotion est forte en regardant le documentaire « Mauvaises filles« , dont le titre raisonne comme un acte d’accusation de toutes ces « malheureuses », retenons simplement que nous espérons tous, que de tels actes ne se reproduisent plus jamais dans notre pays.
Gérard SERIE
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