Synopsis

La technique de la pêche à la mouche demande patience, stratégie et ténacité, pour attirer et capturer le poisson. Et si les mêmes qualités étaient requises pour conquérir le pouvoir ?

Le pêcheur ? Dick Cheney. Le poisson ? Le reste du monde.

En 2001, George W. Bush entre à la Maison Blanche, accompagné de son vice-président, l’influent Dick Cheney. Ruse, sens de la manipulation et opportunisme ont permis à ce dernier de devenir l’homme le plus puissant du pays, et de bouleverser l’ordre mondial.

LES PLEINS POUVOIRS

Vice d'Adam McKay : affiche
Vice d’Adam McKay : affiche

Adam McKay, à l’instar d’Oliver Stone, nous fait découvrir « une autre histoire de l’Amérique « , celle de cet acteur de l’ombre, qui pourtant manipule tous les jeux de lumière : Dick Cheney.

Né en 1941, il débute sa carrière politique en tant que stagiaire d’un membre du Congrès, puis au service de Donald Rumsfeld. Quand ce dernier devient Ministre de la Défense et des armées, entre 1975 et 1977, sous la présidence de Gerald Ford, Dick Cheney occupe la fonction de Chef de Cabinet de la Maison Blanche. Élu dans le Wyoming, il entre à la chambre des représentants en 1978, et renouvelle cinq fois son mandat, avant de rejoindre l’administration de George H. W. Bush, en tant que Ministre de la Défense. Membre du parti Conservateur, il ne participe pas à l’administration Clinton, et devient PDG de la multinationale Halliburton entre 1995 et 2000. Enfin, c’est en 2001 qu’il accède à la Maison Blanche aux côtés de l’inexpérimenté George W. Bush. Dick Cheney a ainsi gravi progressivement les échelons jusqu’à la vice-présidence, et habilement accru ses pouvoirs durant l’occupation de ce poste. Jouant sur les interprétations de la constitution et de son rôle apparemment secondaire, il a pu tirer les ficelles et tenir un rôle décisif dans la réponse des États-Unis aux attentats du 11 septembre 2001.

Dans Vice, Adam McKay dénonce l’intervention américaine en Irak, la « guerre contre le terrorisme », les « procédures d’interrogatoire renforcées », autant d’euphémismes utilisés par le gouvernement américain pour justifier les crimes de guerre, la torture, la mise en place de dispositifs de surveillance et de mise sur écoute de sa population… Le réalisateur se sert aussi bien du discours que des images pour transmettre son message. Laissant une place importante à l’humour, s’adressant directement au public, alternant en permanence entre images d’archives, scènes reconstituées, flashbacks et accélérations, la réalisation place le spectateur au centre de temporalités très différentes. À la fois témoin de ce qui se calcule, et à la fois manipulé, le public ne peut que constater, impuissant, les stratégies et manipulations qui ont redéfini le monde dans les années 2000, et dont les répercussions se font encore ressentir aujourd’hui… L’histoire des États-Unis, et en l’occurrence l’histoire mondiale, semblent dès lors revêtir un caractère inédit, et, presque paradoxalement, Viceest un film plein de suspense.

En revenant sur l’ascension de Dick Cheney, Adam McKay invite à décaler notre regard, rivé sur le bureau ovale. Ouvertement critique, le réalisateur nous montre ce que l’homme politique a saisi avant tout le monde : ce qui se joue dans les couloirs de la Maison Blanche revêt beaucoup plus d’importance que ce qui lui est accordé. « Ceux qui peuvent vous faire croire des absurdités, peuvent vous faire commettre des atrocités », disait Voltaire. Faire des évènements des opportunités à saisir ; avoir, tel un joueur d’échec, deux coups d’avance sur ses adversaires ; saisir l’importance des mots dans le discours politique… autant de stratégies que Shakespeare illustrait dans Macbeth, autant de majeures que Dick Cheney a su maîtriser. Plus que l’histoire d’un homme politique, c’est une « biographie du pouvoir » qu’Adam McKay porte à l’écran.

Océane FÉLIX

Vice d’Adam McKay – Bande-annonce