Synopsis
Au début des années 70, au plus fort de la lutte pour les droits civiques, plusieurs émeutes raciales éclatent dans les grandes villes des États-Unis. Ron Stallworth devient le premier officier Noir américain du Colorado Springs Police Department, mais son arrivée est accueillie avec scepticisme, voire avec une franche hostilité, par les agents les moins gradés du commissariat. Prenant son courage à deux mains, Stallworth va tenter de faire bouger les lignes et, peut-être, de laisser une trace dans l’histoire. Il se fixe alors une mission des plus périlleuses : infiltrer le Ku Klux Klan pour en dénoncer les exactions.
En se faisant passer pour un extrémiste, Stallworth contacte le groupuscule : il ne tarde pas à se voir convier d’en intégrer la garde rapprochée. Il entretient même un rapport privilégié avec le « Grand Wizard » du Klan, David Duke, enchanté par l’engagement de Ron en faveur d’une Amérique blanche. Tandis que l’enquête progresse et devient de plus en plus complexe, Flip Zimmerman, collègue de Stallworth, se fait passer pour Ron lors des rendez-vous avec les membres du groupe suprémaciste et apprend ainsi qu’une opération meurtrière se prépare. Ensemble, Stallworth et Zimmerman font équipe pour neutraliser le Klan dont le véritable objectif est d’aseptiser son discours ultra-violent pour séduire ainsi le plus grand nombre.
Critique
BLACK POWER
BlacKkKlansman : J’ai infiltré le Ku Klux Klan marque le retour au premier plan d’un cinéaste qui s’était trouvé dans une impasse depuis plusieurs années. Par on ne sait quelle grâce, Spike Lee retrouve les sommets de créativité et sa verve qui ont fait sa réputation dans les années 90.
A l’instar d’un Quentin Tarantino, le réalisateur n’a pas son pareil pour revisiter l’histoire par le prisme du ludisme, parfait équilibre entre cinéma politique et divertissant.
Tout comme le metteur en scène d’Inglorious Basterds, Spike Lee offre de purs moments de jubilation.
A y regarder de plus prêt, BlacKkKlansman se révèle une parfaite synthèse de l’oeuvre du réalisateur.
Le spectateur constate avec délectation que le cinéaste a retrouvé tout son panache d’antan. En portant à l’écran l’histoire vraie du premier flic afro-américain d’une ville du Colorado dans les années 70, Spike Lee trouve une occasion unique de retracer l’histoire de la ségrégation des noirs aux Etats-Unis, et de manière sous-jacente l’émergence de l’extrême droite. Il relie ces années de lutte des Noirs américains à l’actualité, à l’Amérique de Donald Trump et au mouvement Black Lives Matter qui se bat aujourd’hui contre les groupuscules néonazis, les suprémacistes blancs et autres klansmen.
Car au-delà de l’audace formelle, BlacKkKlansman ne tergiverse pas. Un point de vue clair et antiraciste pour ce véritable pamphlet politique.
Spike Lee « s’amuse » à enrichir une enquête policière assez banale en apparence avec ces digressions jamais superflues et toujours bien placées. Comme dans Malcolm X (1992), son biopic sur le leader noir américain assassiné en 1965, il affirme l’idée que le cinéma est le mieux à même de représenter le monde.
Sans rogner sur son intégrité mais tout en se voulant accessible et entertainer, le cinéaste signe sans doute là son film majeur, en prise avec notre monde contemporain, dans un pays qui ne s’est pas encore réconcilié avec son passé. Puissant !
Hervé Troccaz
Film américain de Spike Lee. Avec John David Washington, Adam Driver, Topher Grace (2 h 15). Sur le Web : www.focusfeatures.com/blackkklansman, www.facebook.com/UniversalFR et www.facebook.com/blackkklansman