23e soirées d'Été du Château de Machy
23e soirées d’Été du Château de Machy

RENCONTRE AVEC IRIS AGUETTANT

Iris Aguettant
Iris Aguettant

C’est toujours avec un réel plaisir que l’on rencontre cette comédienne et metteur en scène du théâtre de l’Arc en ciel. J’ai profité de sa présence en région loin de l’agitation parisienne pour parler de son nouveau rôle dans la  pièce HAROLD ET MAUD de Colin Higgins, adaptation Jean-Claude Carrière et dans la mise en scène de Jean-Denis Monory, qui sera donné dans le cadre des soirées d’été du château de Machy. Elle m’accueille avec un large sourire et l’oeil rieur pétillant de malice, avant de  me tendre  une main franche en guise de salut et d’entrée en matière.

Dans l’intimité d’un petit salon et en  présence de Brigitte Frénoy, administratrice et Marion De Bussy, stagiaire en communication, après quelques échanges d’amabilités et l’évocation de quelques souvenirs communs nous  entrâmes  dans le vif du sujet.

Pouvez-vous en quelques mots me retracer votre parcours artistique ?

Pour le comprendre je dois vous dire d’abord quelques mot sur mon enfance. Je suis la dernière d’une famille de neuf enfants . Petite fille timide, très tôt j’ai essayé de trouver ma place au sein de mes proches  et dans ma jeune vie. Ma soif d’idéal et ma quête d’absolu m’ont conduit à m’interroger sur mon existence future. Agée de huit ans, je m’amusais et participais  aux spectacles scolaires. Déjà les racines du théâtre poussaient en moi. A seize ans je m’inscrivais  dans l’Atelier- théâtre de Jean Paul VENEL dans la perspective de trouver d’autres jeunes comédiens avec lesquels nous pourrions jouer ensemble. Après mon BAC, j’entamais des études de droits : licence et  maitrise avant de me former au Conservatoire d’Art Dramatique de Lyon. A ma sortie, après l’obtention d’un 1er prix de diction et une médaille d’argent en comédie moderne, je tentais le Conservatoire de Paris. A cette époque, je n’avais toujours pas trouver encore de troupe dans laquelle je pourrai partager les mêmes valeurs d’exigence et presque de foi que requiert ce métier. Je jouais donc dans des pièces de Becket, Ionesco, Racine, Hugo , Labiche, Tchekov …… à Paris, Lyon (Les Célestins) , Avignon…. jusqu’au jour où je rencontrais de jeunes comédiens passionnés, qui me correspondaient et avec lesquels je décidais de travailler avant de débuter un véritable compagnonnage avec eux.

Comment est né le Théâtre de l’ARC EN CIEL ?

Sans entrer dans des détails, disons qu’à Paris,  Olivier Fenoy, jeune comédien stagiaire à la Comédie Française, à l’école de Jacques Charon, de Jean Piat, de Michel Vitold… fonde en 1963 au Quartier Latin le Centre Culturel de Cluny, organisme de création artistique et de diffusion culturelle.

En 1993, à l’exemple de Jacques Copeau, le Théâtre de l’Arc en Ciel choisit Le Château de Machy (près de Lyon) comme sa résidence de création, permettant à la troupe de se donner les moyens d’une respiration ville-campagne. Cette « famille d’artistes » s’élargit selon les besoins des créations.

Après d’autres aventures, en 2014 : Un partenariat avec le Théâtre de l’Epée de Bois à la Cartoucherie, permet un ancrage à Paris et un plus large rayonnement ; les Frères Karamazov (8000 spectateurs), les Dialogues des Carmélites (5800 spectateurs) et en juin  prochain Harold et Maude.

Après le jeu  vous signez de prestigieuses mises en scène ?

Je ne sais pas si elles sont prestigieuse comme vous le dites, mais effectivement j’ai dirigé les comédiens dans Thomas Morede Robert Bolt (Château de Machy, 2004)
La Cerisaie, Anton Tchekhov en  2000 (Château de Machy, 2000), L’Alouette de Jean Anouilh (Château de Machy Lyon, 1998 ; festival d’Avignon 1998 ; Centre Wallonie-Bruxelles Paris1999 ; Le Trianon Paris 1999)

Quel est la genèse de la pièce HAROLD ET MAUDE ?

Il y a parfois des hasard heureux dans des conditions parfois douloureuses de la vie. Nous cherchions d’abord une pièce pour nos soirées d’été. C’est paradoxalement en assistant à l’ enterrement d’un membre de la famille d’Olivier Fenoy que j’ai aperçu Léo Pochat , un jeune homme beau comme un Dieu. C’est ainsi que l’idée de cette pièce a germée dans mon esprit. Je voulais jouer et ne pas mettre en scène. J’ai alors pensé à Jean-Denis Monory  qui après lecture a accepté. Le casting était tout trouvé. J’interpréterai le rôle de Maude et Léo celui d’Harold.

Harold et Maude / Crédit photo Philippe Rabuteau
Harold et Maude / Crédit photo Philippe Rabuteau

Comment avez-vous appréhendé ce rôle ?

L’histoire est d’une actualité et d’une modernité  criante, qui tend à l’universalité. Les personnages dans l’adaptation de Jean-Claude Carrière (1973) sont riches sur le plan psychologique et magnifiques à interpréter pour des comédiens. Tous les rôles sont intéressants. Il n’y a pas de faiblesse au niveau du texte américain  traduit.

L’intrigue est simple : Harold Chasen, 19 ans à l’imagination débordante et morbide. Sa mère, Mme Chasen, une femme stricte, tyrannique et un brin hystérique, s’occupe de chercher une épouse à son fils. Mais lorsque Harold rencontre Maude, « princesse de 80 ans », anticonformiste et pleine de vie, tout change pour le jeune homme et Harold en tombe amoureux.

Je me suis donc glissée tout simplement dans la peau de Maude et endossé tous les habits de son personnage. « Cette chère Maude, si légère en apparence, en réalité pèse son poids. Elle est de ces personnes rares qui viennent vous provoquer, l’air de rien, qui vous tendent en permanence un miroir implacable de vos faux-fuyants, de votre mesquinerie, parfois sans même s’en rendre compte, tellement elles sont revenues de tout et détachées d’elles-mêmes. De ces gens qui semblent puiser leur joie de vivre bien au-delà d’un épicurisme à la mode. Puisse cette pièce nous offrir une échappée du côté de notre espièglerie d’enfance, comme une furieuse envie de vivre : «… mais allez-y Bon Dieu, foncez, tant pis si ça fait mal, sinon, de quoi parlerez-vous au vestiaire ? » Acte 1 scène 11.

Propos recueillis par Gérard SERIE

Crédit photo : Philippe Rabuteau, Maxime Huriez